assise dans un coin de la douche, j'essaie depuis au moins une heure de me débarrasser de mes dernières pensées embuées par l'alcool. l'alcool. l'alcool puis l'alcool. ce con devient mon amant, j'pense même que je suis née bourrée. je crois pas être une fille pessimiste qui se lamente sans arrêt en disant que ce n'est pas ainsi qu'on l'a éduquée, qu'il faut qu'elle se relève et arrête ses conneries avec l'alcool. je suis pas en train de me dire que ma vie est gâchée par l'alcool, je la laisse plutôt se dérouler sans jamais intervenir, je fais ce que je veux et ça me convient très bien puisque personne ne me demande d'être sérieuse et raisonnable dans la vie. je n'ai en aucun cas besoin de m'emmerder, je veux seulement profiter et m'amuser. bref, on l'a compris, j'ai encore le cerveau un peu alcoolisé du bordel que wynona, clyde et moi avons mis dans tout l'immeuble hier soir. bataille de crème fraîche dans les couloirs, beuverie énorme, vomissements depuis le balcon, batailles de culottes et bien d'autres. ces soirées là ont une importance capitale dans nos vies je crois. parfois je déteste mes colocataires, je voudrais habiter seule le reste de ma vie puis je me dit que je m'amuse beaucoup mieux avec eux. être seul, ça doit être horrible. c'est donc de l'eau beaucoup trop bouillante pour un être normal qui me réveille plus ou moins de ma nuit agitée. la fumée de la clope dans ma bouche se mélange un peu avec l'eau qui coule sur mes lèvres. des cigarettes, j'en ai toujours sur moi, même nue. petit à petit, ma gorge se met à brûler de plus en plus fort bien que je ne ressens aucune douleur. je toussote et laisse échappe une boule de feu qui gravite sur ma langue. bordel, je déteste quand ça fait ça, j'ai l'impression de cracher une boule de poil. je crache la boule comme si je crachais de la salive et, à cause de sa petite taille, elle s'estompe d'un coup grâce à l'eau. je ne vais en aucun cas me plaindre d'avoir des superpouvoirs mais parfois, ça peut être très emmerdant. avant de me rendormir sous la douche, c'est avec beaucoup de mal que je me lève et réussit à tenir mon poids sur mes jambes. je suis complètement blasée. je ne veux pas travailler. plus jamais travailler d'ailleurs. ou peut être changer de boulot, je sais pas. parce que, sincèrement, travailler dans un bar toute la journée jusque tard le soir, c'est plus la meilleure chose de ma vie. surtout que je trouve qu'on ne me paie pas assez pour tout ce qu'on me fait subir. je laisse tomber ma clope dans la douche et la laisse s'éteindre avant d'arrêter l'eau. il n'y a personne dans l'appartement. clyde le détestable est partit je ne sais sais où. il dit qu'il pars travailler mais quand on balaie les rues, on n'y va pas je crois. il doit donc être quelque part dans un café, une boîte, un bar, un lit peut être. wynona n'est pas là, on ne sais jamais où elle va. au moins personne ne m'ordonnera d'aller travailler en me disant que j'en ai besoin pour vivre. pas vrai. je suis donc tranquille et peut aller me recoucher ou regarder les aristochats sans que personne ne se marre. je met un pieds par terre et attrape ma serviette en aveugle pour l'entourer autour de moi. je ne suis tout le contraire d'une femme pudique et le fait de me balader nue chez moi ne me dérange pas mais la fenêtre de la salle de bain donne sur l'immeuble d'en face et wyno et moi avons remarqué que quelqu'un nous observe constamment. pas clyde, mais nous. non, je ne suis pas pudique mais là, j'ai de quoi m'inquiéter puisque le voyeur doit bien avoir 80 ans. avec précaution je marche sur le sol glissant jusqu'au miroir et contemple le visage déconfit. je suis franchement pas à mon avantage ses derniers jours. j'approche mon visage de la glace et colle carrément mon nez dessus pour observer les cernes en dessous de mes yeux. on dirait une grosse défoncée qui vendrait sa mère pour un gramme de shit. je ne le suis pas à ce point. et là, en un battements de paupières, un autre visage apparaît à côté du mien dans le miroir. et la réaction que j'ai et une des plus ridicules ; je hurle. je hurle à plein poumons comme si on tentait de me tuer à l'instant en espérant que le vieux pervers d'en face m'entende. je ne prends même pas la peine de regarder l'homme qu'il y a en face de moi et lui balance ma brosse à dent à la gueule. puis viens le miroir de poche, le dentifrice, les capotes de clyde, un bol et alors que je lance du feu dans sa direction, il se baisse d'un coup et la boule enflammée vient brûler le rideau de douche. je m'empresse de rallumer la douche et d'asperger le rideau. voilà, je n'ai plus qu'une moitié de rideau de douche. je prends enfin la peine de me tourner vers lui. encore sous la colère, je ne peut me rendre compte que c'est un jeune homme, beaucoup de cheveux et des traits doux bien que tordus par l'étonnement. « mais bordel, tu as vu ce que tu as fait à mon rideau de douche ?! et je peux savoir comment tu es rentré dans ma salle de bain et pourquoi ?! si c'est pour un viol ou un vol, je te prévins tout de suite, je n'ai aucune tunes et mes perfomances au lit sont déplorables. » c'était tout à fait faux mais autant lui faire croire que je n'avais rien pour moi.